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Le but de ce site est de faire connaître l’abbaye cistercienne appelée « L'ABBAYE ROYALE DE N0TRE-DAME-DE-VALSAUVE » située dans le département du Gard sur la commune de Verfeuil.


Coordonées géographiques

- Latitude : 44° 8' 32,1" ; décimale : 44,1422° Nord.
- Longitude : 4° 26' 51,2" ; décimale : 4,4476° Est.
- Altitude : 204 m (669 pieds)

photo en tete.

Partie II - Histoire des Mères Supérieures à Valsauve



Rappel du sommaire chronologique de l'étude

PARTIE I - Origine de Valsauve

VALSAUVE aujourd’hui
Avant l'arrivée des religieuses

X°/XI° Siècle - Emplacement de leurs habitations : Saint-Peyre, Valsauve.
Origine du nom de Valsauve

XII° Siècle - Donation faite par le roi de France Louis VI «le Gros». Année 1117.
Coexistence de religieux et de religieuses

XIII° Siècle
Disparition de la communauté religieuse d’hommes
Les donats.
Fondation du couvent des religieuses ; il suit la règle de Cîteaux.
Donation faite au couvent

valsauve
Bernardines aux moissons
PARTIE II - Histoire des Mères Supérieures à Valsauve

Année 1205. Supérieure du Convent Rainalde et Marie de Toulouse.
Année 1267. Supérieure du Convent. Cécile
Année 1279. Supérieure du Convent. Françoise
L’église de Valsauve sous la gouvernance de Françoise
Année 1308 Supérieure du Convent. Marie-Firmine

XIV° siècle
Sa translation à Bagnols, au XIV° siècle

PARTIE III - Histoire des Abbesses à Bagnols

Année 1342 Abbesse du Convent. Marguerite de la Baume
Année 1375 Abbesse du Convent. Béatrix de Pierre ou de La Pierre

Année 1432 Abbesse du couvent. Ricarde de Gaujac.

XV° Siècle – Historique du couvent des Angustrines
Année 1459 Abbesse du Convent. Jeanne Maurel
Année ? Abbesse du Convent. Jeanne d’lle
Année 1485 Abbesse du Convent. Catherine Maurel

Le XVI° siècle
Année 1513 Abbesse du Convent. Jeanne de Montdragon
XVI° siècle Valsauve est incendié et une partie de ses propriétés est vendue
Année 1524 Abbesse du Convent.Anne de Montdragon.
Construction d'une chapelle à Verfeuil
Aux ruines matérielles succède la ruine morale
Année 1537 Abbesse du Convent. Marguerite d’Albert.
Année 1566 Abbesse du Convent. Anne d’Albert.

Le XVII° siècle
Année 1601 Abbesse du Convent. Jeanne d’Audibert de Lussan.
Année 1605 Abbesse du Convent. Esther d'Audibert de Lussan.
Au milieu du XVII° siècle, une nouvelle union fut sur le point de s'opérer.
Année 1672 Abbesse du Convent. Marie d’Audibert de Lussan.

PARTIE IV - XVIII° siècle débute par un nouveau massacre à Valsauve

Année 1703. Acte de décès des ouvriers massacrés à Valsauve, par les protestants.
Année 1715 Abbesse du Convent. Monique de Cognos de Clèmes
Etat des charges, dettes et revenus de l’abbaye
Année 1761 Abbesse du Convent. N. Dupuy de Montbrun
Vie du couvent au XVIII° siècle
Année 1773 Abbesse du Convent. Thérèse Flore de Seguins Piegon.
Année 1790 Déclaration des biens, titres, revenus et charges de l’abbaye
Déclaration des biens mobiliers et immeubles, revenus et charges de l’abbaye de Bagnols, jadis à Valsauve.
Année 1790 Rapport officiel relatif à l’étendue et à la valeur de la propriété de Valsauve, situé sur la commune de Verfeuil.
Spoliation et expulsion.
Suppression du couvent.
L’abbaye des Bernardine de Valsauve à Bagnols aujourd’hui.



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Les Supérieures du Convent.

Voir la liste complète en fin d’exposé.

Rainalde et Marie de Toulouse.

(Rainalda et Maria de Tolosà.) Année 1205.

Année 1205

Probabilité du supériorat de Rainalde.

On ne connaît pas le nom des supérieures qui gouvernèrent le couvent de Notre-Dame-de-Valsauve à l’époque de sa fondation et durant les premières années de son existence. Ce n'est que vers le milieu du XIII° siècle que l'incertitude disparaît, sur ce point. Toutefois, dès l’année 1205, on voit apparaître le nom de deux religieuses dans des circonstances telles, qu'il est permis de supposer que l’une pouvait bien être la supérieure de l'établissement et l'autre son assistante.
Une affaire importante intervenue entre les couvents de Valsauve et de Goudargues, à propos d’une sépulture et soumise au jugement des légats du pape, se terminait. Cette affaire a été exposée précédemment. Les droits de chaque couvent furent réglés. Parmi les personnes appelées comme témoins de la conclusion de cette affaire se trouvaient les religieuses Rainalde et Marie de Toulouse. Il n'est pas douteux que leur intervention dans ce litige avait sa raison d'être et s'explique par la nature des intérêts débattus : il s'agissait du couvent.
Mais si ces religieuses parurent, pour ainsi dire officiellement, dans cette circonstance, ce ne put être qu'en raison de la situation élevée qu'elles occupaient dans le monastère. Il est donc tout naturel de voir, dans l’une, la supérieure du couvent de Valsauve, et dans l'autre son assistante, bien que leur titre ne soit pas mentionné dans l'acte.

En tenant compte de la place attribuée à chaque nom dans la pièce qui nous les révèle, l’on peut regarder comme supérieure, sœur Rainalde, puisqu'elle est nommée la première ; et sœur Marie de Toulouse, placée la seconde, serait l'assistante.

Nous ne possédons aucun autre détail sur ces deux religieuses relativement à leur vie monacale. Nous ne sommes pas mieux renseignés sur leur état de famille, du moins quant à Rainalde.

II paraitrait que Marie appartenait à la famille des comtes de Toulouse.

Pour Marie de Toulouse, il n'en est pas tout à fait de même. Son nom patronymique permet de faire des suppositions. Le chanoine Roman, dans son livre : «Goudargues et son monastère», serait porté à croire que sœur Marie appartenait à la puissante famille des comtes de Toulouse. Si ce fait était vrai, il donnerait à l'acte de Raymond de Toulouse prenant, en l'année 1217, sous sa protection et sauvegarde le couvent de Valsauve, plus que le caractère de bienveillance ordinaire que nous lui avons attribué, en le rapportant dans la première partie de ce travail ; — il serait, en outre, l’expression de ses sentiments d'affection en faveur d'un membre de sa famille.

Cependant l'identité des noms de la religieuse et du comte ne paraît pas une preuve suffisante pour affirmer que la religieuse de Valsauve appartenait à l’illustre maison des souverains du Languedoc. Tant de personnes portent le même nom, sans être unies par aucun lien de parenté ! Mais, au fait de la similitude des noms, on peut ajouter l'appui d'un fait historique fourni par l'histoire locale et par celle des comtes de Toulouse ; et dès lors l'hypothèse d'une origine princière attribuée à la religieuse de Valsauve présente, sinon le caractère de la certitude, du moins des apparences sérieuses de vérité.

Au siècle précédent, Faydide, fille de Raymond-Décan, seigneur d'Uzès, s'était mariée avec Alphonse Jourdain, comte de Toulouse. Il n'y aurait rien d'étonnant qu'une de ses petites-filles, venue à Uzès voir la famille et le pays de son aïeule, eût fait connaissance avec le couvent de Valsauve, situé non loin de cette ville ; elle aurait ensuite choisi cette pieuse retraite pour s'y consacrer à Dieu pour toujours, loin des bruits et des grandeurs de ce monde, dans les exercices de la vie religieuse.



Cécile

(Cecilia) Année 1267.

Année 1267

Date du priorat de Cécile

La première religieuse du couvent de Valsauve dont le nom soit parvenu jusqu'à nous, sans nous laisser aucun doute sur son titre de supérieure s'appelait Cécile. Nous ne possédons aucun renseignement, ni sur sa famille et son pays d'origine, ni sur les actes et la durée de son administration. Nous savons seulement qu'elle était à la tête de la communauté en 1267.

Elle reçoit des reconnaissances féodales en faveur de son monastère.

A cette date, le 3 des nones de janvier, divers tenanciers de biens ruraux, situés dans la paroisse de Topian et dépendants du monastère de Valsauve, en font reconnaissance à la prieure Cécile. Les actes furent reçus par le notaire Guillaume de Mazène, et passés devant l’église Saint-Paul de Topian, qui appartenait au couvent de Valsauve, comme les propriétés reconnues par les feudataires.

Noms de quelques feudataires et de quelques témoins de ces actes de reconnaissance.

Parmi les tenanciers qui font reconnaissance à Cécile, se trouvent Pierre de Cornillon, Hugues Olivier, Raymond de Combe, Guillaume de Topian, prêtre et son neveu, Raymond de Pierrefiche, du lieu de Goudargues, et autres.

Furent présents et témoins à ces actes d'hommage, divers religieux et religieuses, parmi lesquels sont désignés nominativement : Bernard, moine du monastère d'Aniane, mais résidant au couvent de Goudargues ; frères Jean Regort et Guillaume Nadal, prêtres et religieux du monastère de Valsauve, Etiennette ou Stéphanie (Stephania), de Saint-Quentin, religieuse de la communauté de Valsauve, qui accompagnait sa supérieure dans cette circonstance, etc.

Donations

Les évêques d'Uzès ne restaient pas en arrière, dans ce mouvement de protection et de pieuse générosité, envers le couvent de Valsauve, un des principaux monastères de femmes de leur diocèse. Nous avons déjà mentionné la générosité de Guillaume de Vénéjan en 1202, il augmente, par le don d'une ferme les revenus de la communauté de Valsauve, qu'il trouve insuffisants ; il ne veut pas que les religieuses déjà placées sous le sceptre de son autorité manquent du nécessaire, lorsqu'il est à la veille d'ouvrir, dans son diocèse, une demeure aux chartreux de Valbonne.

Bertrand, qui fut prieur de Bagnols avant de monter sur le siège épiscopal d’Uzès, fait élever, dans ce couvent, en 1283 une église suffisamment spacieuse pour le nombre des personnes appelées à la fréquenter, et tout à fait en rapport, par la simplicité et la sévérité de ses décorations, avec la règle cistercienne, suivie dans ce monastère et exclusive de tout luxe. Un autre évêque d'Uzès, le successeur immédiat de Bertrand, et peut-être aussi son conseiller dans ses actes de générosité envers Valsauve, car il fut prévôt du chapitre d'Uzès avant d'être évêque de ce diocèse, Guillaume de Gardies, s'intéresse efficacement à la prospérité de ce monastère. En l’année 1287, il approuve et confirme les règles déjà suivies dans le couvent, détermine le nombre des religieuses qui doivent former la communauté, le fixe à vingt (Archives de Valsauve et Gallia Christiana, T. VI. Couvent de Valsauve), et travaille à maintenir la régularité et l’esprit de piété dans cette maison.

Il est à présumer que les successeurs de Bertrand et de Guillaume marchèrent sur leurs traces et se montrèrent les protecteurs et les bienfaiteurs de cette communauté.

Françoise

(Francisca). Années 1279/1295

Année 1279

Transaction avec le prieur de Goudargues.

Il est probable que Françoise succéda directement à Cécile dans le gouvernement du monastère de Valsauve. Nous voyons son nom apparaître à la tête de la communauté, déjà au mois d'août de l’année 1279.
A cette date Françoise transige avec Albert de Sauve, prieur du couvent de Goudargues, au sujet de certains droits sur le fief de Topian. Elle fut représentée, dans cet acte, par Guillaume d'Aigaliers (Guillemus de Aquillerii.), chanoine de la cathédrale d'Uzès et en même temps prieur de l'église de Bagnols. Elle dirigeait encore sa communauté en 1295.

Sous le priorat de Françoise plusieurs faits importants s'accomplirent dans le monastère de Valsauve et signalèrent, d'une manière remarquable, la longue administration de cette supérieure.

Construction de l’église

Le couvent de Valsauve avait déjà pris, à cette époque, un accroissement considérable. La surface de ses propriétés territoriales s’étendait, peu à peu, par de nouvelles acquisitions ou par la générosité de pieux bienfaiteurs. La misère des premiers temps de la fondation avait disparu et se trouvait remplacée par une certaine aisance. Le recrutement du personnel religieux s'opérait facilement ; les demandes d'admission se présentaient plus nombreuses que n'en réclamait le besoin de la communauté et que ne permettait d'en recevoir l’enceinte du noviciat ; les premières familles de la contrée fournissaient le principal contingent des vocations ; le succès de l'œuvre ne donnait aucune crainte ; l'avenir était assuré.
Tout se développait dans des conditions régulières et favorables.
Les constructions seules de l'édifice avaient peu changé. On avait bien opéré, à diverses époques, quelques agrandissements; mais ces additions étaient peu considérables et devenaient chaque jour plus insuffisantes pour la population actuelle, plus nombreuse qu'autrefois. Bien plus, on avait exécuté ces travaux un peu au hasard, selon que les exigences du moment les avaient réclamés, et sans aucun plan d'ensemble. Aussi l'édifice, modeste et exigu, manquait autant de régularité que d'élégance et portait les caractères de pauvreté qui présidèrent à la fondation du couvent. Une transformation était devenue nécessaire : église et cloître devaient être reconstruits, mis en harmonie avec la situation nouvelle du monastère et avoir des proportions en rapport avec le nombre des personnes appelées à y vivre et à y prier.
Il fallait plus d'espace à des religieuses plus nombreuses et une église plus convenable à un couvent déjà important et bien posé dans l'estime des grands et du peuple. Tels étaient le sentiment général de la communauté et l'avis des personnes qui connaissaient le monastère et s'intéressaient à sa prospérité.

Uzès possédait, à cette époque, un évêque généreux, tout dévoué à Valsauve et surtout à la prieure, dont il connaissait les vertus et avait apprécié le mérite. Françoise sut profiter de la bienveillance et des bonnes dispositions de Bertrand, en faveur de son monastère. Souvent, dans ses visites canoniques et dans ses entretiens avec les religieuses, Bertrand avait manifesté le regret de voir les constructions du couvent dans des conditions si défectueuses et exprimé le désir d’un changement à cet état des choses. La suite prouva la sincérité de ses sentiments: son concours fut efficace et généreux.
A lui seul il ne pouvait refaire le cloître et l'église, du moins présentement. Françoise et ses religieuses réclamèrent, avant toute autre construction, celle d'une nouvelle chapelle, renvoyant à plus tard la réfection de leur cloître. Elles étaient heureuses d'offrir une demeure convenable au Dieu pour l'amour duquel elles avaient quitté le monde ; elles pensaient que ce Dieu auquel leur affection allait donner un sanctuaire ne laisserait pas sans récompense, même ici-bas, leur désintéressement et saurait leur procurer, en temps opportun, un cloître plus convenable que celui qu'elles habitaient.
Nous verrons plus tard la réalisation de leurs désirs et de leurs espérances.

Bertrand aurait préféré commencer par le cloître, l'œuvre de reconstruction, afin de bientôt loger plus à l'aise les religieuses ; il dut se rendre à leurs instantes et pieuses réclamations. Un architecte fut appelé. Ce fut probablement quelque moine désigné par l'évêque d'Uzès. Le plan qu'il présenta ne manquait, malgré sa sévérité et sa simplicité, ni de grandeur, ni d'élégance.
Les dispositions intérieures de l'édifice répondaient à toutes les exigences de la communauté ; ses dimensions suffisaient pour recevoir le concours ordinaire des fidèles, et le caractère de son architecture, tout à la fois sévère, sobre d'ornement et néanmoins distingué, reflétait parfaitement l'esprit de la maison composée de personnes d'élite, vivant sous la règle austère de Cîteaux.

Le plan fut approuvé par l'évêque et les religieuses. On mit la main à l'œuvre, on y travailla avec activité.

Françoise eut la consolation de voir finir les travaux et d'introduire ses sœurs dans le nouveau sanctuaire, en l’année 1283.

L'inauguration du service divin dans cette chapelle dût être une véritable fête pour Bertrand, qui l'avait fait construire. Les religieuses lui en témoignèrent leur vive reconnaissance, pendant les deux ans qu'il vécut encore.

Elles ne l’oublièrent pas non plus, après sa mort: c'était plus qu'un bienfaiteur qu'elles perdaient: c'était un ami sincèrement dévoué, un père plein de bonté et de tendresse. Françoise surtout sentit vivement le coup de cette perte. Bertrand l'avait encouragée, soutenue, guidée à travers les difficultés, sans cesse renaissantes, de l'administration ; il avait pris part à ses peines, à ses tribulations, à ses travaux ; il avait partagé ses joies, ses craintes, ses espérances ; aussi son dévouement pour ce digne prélat était sans bornes.
Elle ne prenait aucune décision importante, ne formait aucun projet sérieux, sans le consulter, et suivait les conseils du pieux vieillard comme des oracles. Françoise et ses compagnes cherchèrent dans la prière un soulagement à leur douleur. Elles ne se contentèrent pas de prier pour lui en particulier. Un service solennel fut fondé et célébré, chaque année, dans ce monastère, pour le repos de l'âme de l'évêque Bertrand. Un demi-siècle plus tard, une inscription commémorative fut gravée sur la façade de l'église de Valsauve, afin de perpétuer publiquement le souvenir des bienfaits de l'évêque d'Uzès et le témoignage de gratitude des religieuses de ce couvent.

D'autres bienfaiteurs aidèrent Françoise à décorer la nouvelle église. Parmi les plus illustres et les plus riches apparaît Décan, seigneur d'Uzès. Dans son testament du 4 juillet 1283, il lègue, pour l’ornementation de l’église de Valsauve, cent sols tournois. Décan, seigneur d'Uzès, était fils de Brémond d’Uzès et de Guiraude d'Adbémar de Rochemore ; il était frère de Robert, évêque d'Avignon. II épousa Etmengarde, fille de Bernard Pellet seigneur d'Alais (Ales); il mourut vers l'an 1286. Son testament contient un grand nombre de dispositions pieuses le couvent de Valsauve eut droit à ses largesses testamendiaires.

Année 1283

eglise

Le cloitre et l'église - Photo Bruce Gacoin



Révision des statuts suite à un certain relachement de la règle et un surcroit de vocations.

Un acte encore plus important pour la vie religieuse que la construction d'une riche et vaste chapelle, signala le cours du priorat de Françoise. Les beaux monuments ne font pas la gloire principale d'un monastère ; la pratique des vertus est préférable aux richesses d'un édifice ; mais la vertu ne se développe et ne fleurit, au sein des communautés religieuses, que sous le souffle de la régularité. Françoise n'ignorait pas ce principe élémentaire de la vie claustrale ; aussi ses efforts tendirent à faire observer, autant que possible, les prescriptions de la règle. Des difficultés sérieuses s'opposaient à la réalisation de ses désirs : le concours du nouvel évêque, successeur de Bertrand, lui aida à les faire disparaître.

Un certain relâchement, suite inévitable des faiblesses de la nature humaine, s'était peu à peu glissé au sein de la communauté et avait fait négliger l'accomplissement de divers points du règlement. Comme il arrive toujours en pareille circonstance, ces omissions s'étaient produites d'abord sous forme d'exception ; elles avaient ensuite présenté le titre et acquis les droits d'une coutume. Deux autres causes, bien innocentes en elles-mêmes et dont les effets ne furent pas moins pernicieux, avaient aggravé cette situation. Cette double cause fut la construction même de l'église du couvent et la multiplicité des vocations qui se manifestèrent à cette époque.

Les travaux de construction de la chapelle durèrent assez longtemps ; de nombreux ouvriers y furent employés; souvent il fallut se mettre en rapport avec eux, soit pour leur fournir des objets nécessaires, soit pour les secourir au milieu de cette solitude privée de toute ressource. Le mouvement continuel produit par leur présence, porta une réelle atteinte au recueillement du monastère : ce n'est jamais impunément qu'une communauté religieuse sort de ses habitudes de retraite et de silence.

La seconde cause signalée ne fut pas moins nuisible au bon ordre. Rien n'était réglé par rapport au nombre des admissions dans le couvent, ou si quelque règlement existait à cet égards ses prescriptions n'étaient pas suivies. Il se présentait assez souvent de jeunes personnes désireuses de se consacrer à Dieu, dans cette vallée de salut, sous la conduite de la prieure Françoise.
Elles arrivaient pleines d'ardeurs, accompagnées de toutes les marques d'une excellente vocation. Plusieurs appartenaient aux plus nobles familles de la contrée, presque toutes bienfaitrices du couvent. Comment se résoudre à les refuser ? Il est d'ailleurs si doux au cœur d'une supérieure, de voir sa communauté recherchée ! La maison était déjà suffisamment remplie et malgré le défaut d'espace pour les loger et l'insuffisance des revenus pour les faire vivre on en recevait encore.
On comptait sur l'intervention de la Providence pour l'agrandissement de la maison et une augmentation de revenus proportionnés aux besoins du monastère. Le ciel avait si bien servi pour la construction de leur église; il pouvait bien accorder un autre cloître et un peu plus de pain !

Ces admissions disproportionnées avec l'exiguïté des bâtiments et la modicité des ressources produisaient une gêne et compromettaient l'ordre intérieur. La prieure gémissait de cette situation, sans avoir le courage d'y porter ouvertement remède. Elle souhaitait ardemment une réforme ; mais elle était bien aise que la responsabilité d'une pareille mesure, presque toujours odieuse, pesât sur une autre personne.

L'évêque d'Uzès vint à son secours. Guillaume de Gardies (1) avait succédé à Bertrand. Avant son élévation à l’épiscopat il fut chanoine et devint prévôt du chapitre de l'église cathédrale d'Uzès. Le prévôt était le premier dignitaire ecclésiastique de ce diocèse après l'évêque. Il est probable qu'à ce titre Guillaume avait assisté aux fêtes de la consécration de l'église de Valsauve, et avait accompagné plusieurs fois l'évêque dans ses visites à ce monastère.
D'autres circonstances avaient pu le conduire dans cette solitude. Sa famille possédait la seigneurie de Fontarèche dont les propriétés touchent, à celles de Valsauve. Le couvent de Valsauve ne lui était donc pas inconnu quand il arriva à l’épiscopat, il savait sa position, ses ressources et l'esprit qui ranimait. Il con- naissait les intentions excellentes et les embarras de la prieure, les côtés faibles de la communauté et les vertus pratiquées dans cette demeure. Valsauve, l'objet des prédilections et des générosités de son prédécesseur, ne lui resta pas indifférent il porta sur lui son attention et les regards de sa vigilance épiscopale.

Bertrand avait contribué au développement de ce monastère par la construction d'une église ; Guillaume travailla à sa prospérité, en ramenant à l'observance de la règle, un peu trop oubliée. Il se fit communiquer les statuts de la communauté, les examina attentivement et, de l'avis de son conseil et de concert avec la prieure, il retrancha les articles inutiles, ajouta les modifications jugées nécessaires dans les circonstances présentes et, ainsi réformés, il les confirma du sceau de son autorité et les promulgua : ce fut en l’année 1287(2).

Dans cet acte, Guillaume détermine le nombre de religieuses qui composeront la communauté de Valsauve; il le fixe à vingt, nombre suffisant pour remplir les offices et accomplir les devoirs prescrits par la règle; nombre, en même temps, en rapport avec l’étendue du local actuel et les ressources matérielles du couvent. En restant désormais dans ces limites, on n'aura à craindre ni l'encombrement dans la maison, ni l'insuffisance dans les revenus.

Année 1287

Reconnaissances féodales.

Françoise voulut apporter dans la gestion du temporel du monastère la réforme et l'ordre, introduits par l'évêque d'Uzès, dans la direction du spirituel. Cette mesure était nécessaire pour reconnaître exactement les ressources ordinaires sur lesquelles la communauté pouvait compter ; elle n'était pas moins indispensable pour constater ou assurer les droits du couvent d'une manière précise, certaine, efficace.

Le monastère de Valsauve possédait, à cette époque, des propriétés territoriales considérables; les unes étaient directement régies par la communauté ; d'autres se trouvaient indivises avec des voisins ; enfin, plusieurs avaient été données en emphytéose féodale, c'est-à- dire cédées à diverses personnes moyennant une redevance déterminée et sous la réserve de certains droits.
La prieure pourvut à la bonne exploitation des terres cultivées par le couvent, fit exactement reconnaître ses droits par les emphytéotes et régla habilement quelques questions relatives à des biens indivis.

C'est dans ce dernier ordre d'affaires que Françoise agissait quand elle traita avec le damoiseau Gui de Saint-Laurent. Ce gentilhomme possédait, en indivis, avec le couvent de Valsauve, un bois appelé Rovayrole.
Françoise, pour prévenir les difficultés qui pourraient surgir plus tard, relativement à la jouissance de cette forêt, si elle restait indivise, en fit le partage avec son copropriétaire. Le chanoine Pierre de Saint-Laurent, official du diocèse d'Uzès, servit d'intermédiaire pour la conclusion du contrat. L'acte fut passé, dans le bois même, sur le pic appelé Malmontat, en présence de plusieurs témoins. Arnaud de Valence, notaire de l'évêque d'Uzès, reçut cet acte, qui porte la date du jeudi avant la fête de la chaire de Saint-Pierre de l'année 1287.

Le couvent de Valsauve avait cédé plusieurs propriétés à titre emphytéotique. D'après les lois réglant cette espèce de contrat, le cédant ou ses successeurs pouvaient faire reconnaître leurs droits chaque fois qu'ils le jugeaient à propos, et les cessionnaires ou leurs successeurs ne pouvaient refuser cette reconnaissance, sous peine de se voir dépouiller de l'objet cédé. L'emphytéote faisait ses déclarations sous la foi d'un serment solennel et en présence de plusieurs témoins ; il déclarait la nature des propriétés qu'il tenait : — maison, terre, forêt, — les conditions auxquelles il les avait reçues, les redevances qu'il devait payer, et son intention d'accomplir exactement ses obligations de bon et fidèle emphytéote. Le maître, de son côté, promettait avec serment délaisser l'emphytéote jouir en paix des choses reconnues et dénombrées. Un notaire dressait acte de ces déclarations réciproques.

Il est probable qu'à son arrivée au pouvoir, Françoise n'avait pas réclamé reconnaissance de ses feudataires ou tenanciers, ou du moins n'avait pas insisté pour l'obtenir. Elle exigea plus tard cette formalité ; elle la faisait accomplir quelques mois après le règlement du partage de la Rovayrole, avec le damoiseau Gui de Saint-Laurent. Le notaire Bernard Begon dressa l’acte de plusieurs de ces reconnaissances, dans le presbytère de Verfeuil, au mois de juin 1288 ( « Acta fucrunt hec in claustra ecclesie de Viridifolio, iu presencia et testimonio domun Potri de Brugeriis, presbyteri, donnm Jacobt de Pod10-alto, Jurispenti, etc., etc. » )

Les tenanciers mentionnés dans cet acte sont nombreux, ainsi que les propriétés reconnues. Tenanciers et propriétés dénombrées se trouvaient répartis sur les paroisses de Verfeuil, Topian, Goudargues et Cornillon. Par cet acte, la prieure renouvela les titres de propriété de son couvent sur les possessions de ses emphytéotes et constata l'étendue totale des ressources provenant, de ce chef, à son monastère.

Lettres de protection du roi de France

Année 1294

Françoise ne se contenta pas de la constatation des droits et des revenus de son monastère. Ces sages mesures de prévoyance, d'ordre et de bonne administration pouvaient devenir inutiles au milieu des troubles publics. La rapacité brutale de certains seigneurs du voisinage et la violence des malfaiteurs vagabonds étaient sans cesse à craindre, à cette époque. Il ne manquait pas de seigneurs disposés à imiter la conduite de Pons Guillaume de Barjac, dépouillant de ses terres, environ deux siècles plus tôt, le couvent de Goudargues, voisin de Valsauve, pour les donner en dot à sa fille (Gallia christiana, t. VI. Diocèse d’Uzès, couvent de Goudargues.)

L'apparition de bandes armées, ravageant les campagnes, n'était pas non plus chose bien rare. Françoise voulut mettre son monastère à l'abri de ces dangers.
Son projet était bien légitime ; ses craintes ne manquaient pas de fondement ; ses démarches furent couronnées de succès. Elle implora la protection du roi de France : Philippe le Bel se rendit à ses désirs. En mars de l’année 1294, ce monarque approuve et confirme une charte de protection accordée à ce couvent en 1217 par Raymond, comte de Toulouse.(Archives de Valsauve et Dom Vaissette : Histoire du Languedoc.)

Quelques mois après, il délivre de nouvelles lettres et prend, d'une manière spéciale, sous sa protection et sauvegarde, le couvent de Valsauve (Histoire générale du Languedoc, par D. D, Vie et Vaisselle, t. II.). Cet acte de la protection royale, deux fois accordé par le même prince, prouve l'activité et la prudence de la prieure à se prémunir efficacement contre les dangers, et son habileté à établir ou à conserver des relations avec des personnes puissantes et capables de soutenir, auprès du roi, les intérêts de sa communauté.

Françoise ne s'en tint pas là ; elle compléta son œuvre de défense par une dernière démarche. Lorsqu’Alphonse de Rouvra, sénéchal de Beaucaire, alla présider à Uzès des assises solennelles, la prieure Françoise lui présenta, le 27 janvier 1295, les deux actes royaux obtenus et possédés par son couvent; elle fit constater publiquement l'authenticité de ces titres précieux et prendre les mesures nécessaires pour assurer l'exécution de leur teneur (Histoire de Nîmes, par Ménard, t. II.)

Cet acte est le dernier que nous ayons trouvé, dans lequel paraît le nom de Françoise, prieure de Valsauve.

eglise

Photo Bruce Gacoin



L’église de Valsauve sous la gouvernance de Françoise

L'église de Valsauve, malgré la simplicité et la sévérité de son architecture, ne manque pas d'un certain air de grandeur. Elle est construite, à l'intérieur et à l'extérieur, en appareil moyen, avec des pierres d'un grain très dur, taillées au ciseau. La voûte, en berceau, est du style ogival, ainsi que les fenêtres qui l’éclairaient ; mais la porte de sa façade, ornée de deux élégantes colonnettes, avec leurs chapiteaux de feuillages, est du roman le plus pur.

L'édifice mesure dix-huit mètres de longueur, dans œuvre ; près du sanctuaire, sont établies deux petites chapelles d'environ deux mètres de profondeur, sur 2 m. 35 d'ouverture. Les murs du fond du chœur, comme ceux des chapelles sont rectilignes.

L'église est orientée. Sa construction fut terminée en 1283, par les soins de Bertrand, évêque d'Uzès, un des principaux bienfaiteurs du couvent. Une inscription, gravée sur le mur de la façade, rappelle cette date et quelques autres faits. Cette inscription est placée à l'extérieur, sur le côté gauche de la porte d'entrée, vers la base du tympan qui surmonte cette porte. Elle fut tracée dans la première moitié du quatorzième siècle. Elle est écrite en latin, avec des caractères gothiques.

inscription


En voici la traduction :

«Au nom du Seigneur, ainsi soit-il. Sachent tous et chacun, qui verront la présente inscription, que religieuse et noble dame Marie Firmine, prieure de ce monastère, la fit graver le cinquième jour du mois d'octobre 1331, afin que mémoire soit gardée pour l'âme du révérendissime seigneur et père en Christ, Bertrand, évêque d'Uzès, d'heureuse mémoire, qui, en l'année 1283, fit construire cette église en l'honneur et vénération de la bienheureuse Vierge Marie. Que son âme repose en paix !

Postérieurement, l'an du Seigneur 1319, Andemar d'Audigier, damoiseau du Bourg Saint- Andéol, au diocèse de Viviers, a fait bâtir cette partie du cloître, à cause de son respect pour le Dieu Tout-puissant et la glorieuse Vierge sa Mère.»

inscription


L'église de Valsauve est aujourd'hui (en 1885) divisée en quatre parties : deux sont au rez-de-chaussée et deux sont au premier étage ; l'une de ces dernières sert d'oratoire où l'on célèbre, de temps en temps, la sainte messe ; elle comprend la partie supérieure du sanctuaire et des chapelles.

La partie du jardin qui s'étend au devant de l'Eglise, fut autrefois un cimetière. Les ossements humains trouvés, en grand nombre, sur ce point, lors des fouilles opérées pour la plantation des arbres du parterre, ne laissent aucun doute à cet égard. L'existence d'un cimetière, en pareil lieu, est d'ailleurs entièrement conforme aux anciens usages de l'Eglise catholique et de ses couvents : c'était presque toujours autour des édifices religieux, quand ce n'était pas dans leur enceinte même, qu'on ensevelissait les défunts, afin d'attirer l'attention pieuse des vivants en faveur des morts et de leur rappeler par la vue des tombeaux, qu'ils devaient eux-mêmes mourir un jour.

jardin

Photo Bruce Gacoin



Marie-Firmine

(Maria-Firmina) 1308 à 1333.

Année 1308

Transaction avec le prieur de Goudargues.

Le nom de Marie Firmine, prieure du couvent de Valsauve, ne se trouve pas seulement écrit dans les livres et tracé sur les parchemins du moyen âge, il est encore gravé sur la pierre ; il fait partie d'une inscription remarquable, placée sur la façade de l’église du monastère, à côté de la gracieuse porte romane qui décore l'entrée de cet édifice.

Marie-Firmine gouverna le couvent de Valsauve pendant plus de vingt-cinq ans. Elle était déjà prieure en 1308 ; elle remplissait encore les mêmes fonctions en l’année 1333.

Le 17 des calendes de juin (16 mai) 1308, la prieure, Marie-Firmine reçoit des reconnaissances pour des propriétés relevant de la directe de son monastère ; plusieurs des propriétés reconnues se trouvaient situées dans la juridiction du prieuré Saint-Paul-de-Topian. (Une grande fortune, jointe à des sentiments pieux, permettait à cette famille de se montrer généreuse envers les couvents. Des rapports de bon voisinage durent la porter à tourner ses faveurs du côté de Valsauve).

D'autres reconnaissances lui furent faites à d'autres époques. Nous n'avons relevé exactement celles de l'année 1308 que pour préciser la date à laquelle le nom de Marie-Firmine apparaît pour la première fois dans les papiers tombés sous notre main.

reconnaissance
Construction d'une partie du cloitre par le damoiseau Andemar d'Audigier.

La prieure Marie-Firmine partagea avec la prieure Françoise les soucis, les fatigues et la gloire de la construction du couvent de Valsauve. Sous son priorat le damoiseau Andemar d'Audigier fit construire la partie du cloître attenante à l'église et compléta probablement, par ce travail, l'œuvre du renouvellement matériel du monastère. Ce seigneur était du Bourg-Saint-Andéol, au diocèse de Viviers. Par suite de quelles circonstances fut-il amené à cet acte de pieuse générosité? Nous n'avons rien trouvé qui l'indique d’une manière précise. Le monument épigraphique qui nous a conservé le souvenir de ce fait, se tait sur le mobile de l'action. Il nous apprend le but et non la cause de cette largesse : ce fut, dit-il, pour glorifier le Dieu Tout- Puissant et honorer la Bienheureuse Vierge, sa mère.

Voici deux explications, assez plausibles, tant l'une que l'autre, de la conduite généreuse d'Andémar, envers le couvent de Valsauve.

Les Audigier, du Bourg-Saint-Andéol, possédaient, au XIV° siècle, des biens et des droits seigneuriaux considérables à Verfeuil, paroisse sur laquelle s'élevait le monastère de N.-D. De-Valsauve. Le damoiseau Guillaume d'Audigier, du Bourg-Saint-Andéol, en faisait hommage et dénombrement au roi, le 11 novembre 1359 (Archives ducales d'Uzès et Notes sur Verfeuil, par l'abbé P. de Laville, page 68, où sont énumérées les possessions des d’Audigier, à Verfeuil.)

Il peut se faire qu’à cette première cause se soit ajouté un autre motif. Un sentiment d'affection filiale a pu pousser les Audigier à faire cette construction.
Les actes de ce couvent nous apprennent que, parmi les religieuses de la communauté, vers cette époque, se trouvait Alix d'Audigier : c'était, sans doute, une fille de cette famille. Sa profession religieuse à Valsauve explique tout naturellement l'acte d'Andemar, sans rien enlever au mérite de sa bonne œuvre. Le damoiseau accomplissait ainsi un acte de générosité envers le couvent, tout en travaillant pour un membre vénéré et chéri de sa famille. Ces constructions furent faites en l'année 1317.

La transformation matérielle du couvent était enfin terminée : Valsauve possédait maintenant une belle église et à côté de l’église on avait élevé un cloître en rapport avec l'importance de la communauté. Ces constructions, et nous l'avons vu, étaient dues, en grande partie, à de pieuses et nobles générosités. Deux bienfaiteurs surtout s'étaient distingués par la largesse de leurs dons: Bertrand, évêque d'Uzès, dans la construction de l’église, et Andémar d'Audigier, dans celle du cloitre. Firmine ne voulut pas que le souvenir de leurs bienfaits restât ignoré de la postérité et put s'oublier un jour. Elle fit placer, sur la façade de l'église, une inscription commémorative de la construction de cet édifice et du cloitre contigu. Elle marque, dans ce monument, la date de ces constructions et le nom des généreux bienfaiteurs qui les firent élever ; elle nous apprend que l'église nouvelle fut dédiée à Marie ; et recommande aux prières et au souvenir de ceux qui liront cette inscription, la mémoire de l'évêque Bertrand, déjà décédé depuis plusieurs années. Andémar d'Audigier devait vivre encore ; s'il fût mort, la prieure n'aurait pas manqué de réclamer pour lui un souvenir dans la prière.
C'est au mois d'octobre de l'année 1331 que Marie Firmine fit poser cette inscription, témoignage visible, incontestable et permanent des sentiments de reconnaissance de la prieure et de son monastère. Le nom de Marie Firmine paraît dans le corps de l’inscription et se trouve, par ce fait, conservé sur la pierre, avec les noms de l’évêque Bertrand et du damoiseau Audigier, principaux bienfaiteurs du monastère de Valsauve.

Année 1331

Vente d’une maison située à Saint-Marcel.

Malgré la générosité de ses bienfaiteurs, malgré l'augmentation et la bonne administration de ses revenus, la communauté se trouva parfois dans la gêne, à cette époque : elle avait eu à intervenir dans plusieurs des frais occasionnés par les grands travaux de construction exécutés sous les priorats de Françoise et de Marie-Firmine.

Dans toute construction importante survient beaucoup d'imprévu ; à côté de l'imprévu naissent les dépenses de détail, souvent considérables. Les dons des bienfaiteurs étant ordinairement limités à un chiffre déterminé, c'est aux bénéficiaires à compléter le restant des frais. Le couvent de Valsauve se trouva dans cette situation. Les dépenses qu'il fut entraîné à faire, pour compléter ou meubler les constructions nouvelles, dépassèrent la somme de ses économies. Marie-Firmine ne voulut pas laisser le couvent dans l'embarras des dettes. Ses sœurs furent de son avis. La communauté possédait, dans le village de Saint-Marcel-de-Careiret, une maison que le seigneur Guillaume de Sabran désirait acquérir. Elle lui fut vendue au prix de quinze livres et sous la censé annuelle de deux deniers ; mais quand ce seigneur réclama l'investiture de cette acquisition, le bayle Me Guillaume de Mandagout, évêque d'Uzès et seigneur majeur de Saint-Marcel, refusa de la lui donner ; il retint cette maison pour son maître, en vertu de son droit de prélation (Prélation, droit qui permettait à un seigneur de reprendre une propriété aliénée primitivement par lui ou par ses prédécesseurs, moyennant le remboursement, si elle se vendait, du prix offert par l'acquéreur.) et remboursa, au seigneur de Sabran et à sa femme, l’argent qu'ils avaient compté aux religieuses. C'est au mois de septembre 1321 que s'accomplissait ce dernier fait (Archives ducales d'Uzès. Inventaire des papiers de l'évêché d’Uzès, dressé en 1570).

Achat d'une forêt.

Quelques années plus tard, sous la sage administration de Marie-Firmine, la situation du couvent avait changé de face. Le monastère avait payé ses dettes et réalisé des économies ; il put acquérir de nouvelles propriétés et étendre les limites de son territoire.

La partie de la montagne Malmontat ou Rovayrole, appelée aujourd'hui (1885) Dévezon, laissée à Gui de Saint-Laurent, lors du partage intervenu entre ce seigneur et le monastère de Valsauve, en 1287, avait passé dans les mains des enfants de Gui. Elle resta leur propriété pendant près d'un demi-siècle. Des dettes, contractées à diverses dates, les forcèrent peu à peu à vendre. Pierre de Saint-Laurent fut même exproprié, et le bois de la Rovayrole mis à l'encan (aux enchères), par l'autorité du petit-scel de Montpellier (Ce tribunal portait le nom de Petit-Scel, parce qu'il n'employait pour sceller ses actes qu'un sceau de petite dimension. VII° Série, t. VII, 1884).

Marie Firmine ne laissa pas échapper l'occasion d'incorporer, dans le domaine de Valsauve, cette portion de forêt qui lui était contigüe. Elle l'acheta par l'intermédiaire de Guillaume Vinot, notaire à Uzès, et en paya 24 livres 10 sols tournois. Mais noble Pierre de Saint-Laurent n'était pas seul à posséder des droits sur cette forêt ; ses frères, les damoiseaux Gui et Rostan de Saint-Laurent y avaient leur part.

La prieure, pour rester seule maîtresse de cette portion de forêt, traita directement avec tous les intéressés et les désista de leurs droits, en leur donnant la somme de 48 livres tournois. L'acte de vente fut passé dans le bois vendu, le 3 avril 1332. Raymond de Cavaillon, notaire de Bérenger d'Uzès, seigneur d'Uzès et de Saint-Laurent de la Vernède, rédigea le contrat ; il fut approuvé par les trois frères vendeurs, ainsi que par Eygline, femme de Pierre, Alizé, femme de Gui et par Pons, fils d'Alizé et de Gui. Parmi les témoins se trouvaient deux prêtres : Jean Dotajon et Pierre Buzen (Archives de Valsauve.)

Ainsi Marie-Firmine eut le privilège de donner à ses sœurs un cloître convenable, d'éteindre les dettes contractées pour l'exécution de grands travaux et de parvenir encore à augmenter, par des acquisitions, l'étendue territoriale du couvent de Valsauve. Il est à présumer que les résultats moraux de son administration ne le cédèrent en rien aux succès matériels que nous avons signalés.

Année 1332

XIV° siècle

Au commencement du siècle suivant, en 1319, le damoiseau Andemar d'Audigier, du Bourg-Saint- Andéol, mais dont la famille possédait, à Verfeuil, des propriétés considérables, comme le prouvent les actes d'hommages rendus au roi, à cette époque, dans la sénéchaussée de Beaucaire et Nîmes, fit construire, à ses frais, une partie du monastère (Inscription de l’église de Valsauve, rapportée ci-après.), afin de donner au personnel de cette communauté l'espace nécessaire.

Vers le milieu du XIV° siècle, en 1347, une pieuse femme, Alix Reboul, de la paroisse de Topian (Archives de Topian), et vers la fin du même siècle, en 1381, Jacques Adhagat, habitant de Verfeuil (Archives de Valsauve et Gallia Christiana, T. VI), lui donnent toute leur fortune.

Au dire de la tradition orale, les seigneurs et les communautés municipales, dont les possessions territoriales touchent à celles de Valsauve, se font un devoir de lui céder quelque portion inculte de leur terrain, en témoignage de vénération et de gratitude. On veut, par ces actes de générosité, reconnaître les services rendus par le couvent aux populations voisines qu'il édifie par l'exemple de ses vertus et soulage, dans leurs misères, par la charité de ses larges aumônes ; on veut aussi, par ces dons, participer aux mérites et aux bonnes œuvres des saintes âmes cachées dans cette pieuse retraip>te, et attirer, par la médiation de leurs prières, les bénédictions du ciel sur les familles et les paroisses bienfaitrices.

Les princes de l'Eglise et les souverains Pontifes eux-mêmes ne l'ignorèrent pas ; ils portèrent leur attention sur le monastère de Notre-Dame-de- Valsauve et s'occupèrent utilement de ses intérêts.

Année 1375

Quelques années plus tôt, en 1375, le pape Grégoire XI avait déjà donné aux religieuses le bénéfice de Saint-Thyrce-les-Maransan, situé sur le territoire de la ville de Bagnols; elles le possédèrent jusqu'en 1790. A cette dernière date, la dîme de ce bénéfice leur rapportait environ 1.400 fr.. Les papes ne bornèrent pas leurs faveurs, envers ce monastère, à la concession des biens matériels ; par des bulles diverses, ils se plurent à lui donner des privilèges nombreux et des droits importants. L'inventaire des titres de la communauté mentionne six pièces de cette nature encore en sa possession, en 1790 (2). Clément V en avait donné une, en l’année 1310.

La translation à Bagnols, au XIV° siècle.

On peut dire que ceux qui ont survécu à la famine du 14° siècle durent faire face à la peste qui suivit et les survivants durent subir les pillages, meurtres et viols des routiers et des brigands pendant la guerre de 100 ans.

Malgré la bienveillance et la protection, cette solitude ne put échapper aux malheurs qui s'abattirent sur la France au XIV° siècle. L'invasion anglaise et les bandes pillardes qui surgirent, à cette époque, forcèrent les religieuses de Valsauve à quitter une retraite isolée, sans défense et ouverte à toutes les attaques. Elles durent chercher ailleurs un abri sûr contre ces troupes indisciplinées, grossières, avides de pillage et de sang, qui parcouraient la France, ravageant tout ce qu'elles rencontraient, et passant au fil de l'épée ou saccageant et incendiant tout ce qui leur opposait résistance. Leur choix, paraît-il, se porta d'abord sur le village de Saint-Marcel-de-Careiret, situé à une petite distance de leur couvent, — à trois kilomètres environ, — et dans lequel Valsauve possédait des maisons, des terres et des droits seigneuriaux considérables. Elles y firent préparer une demeure destinée à les recevoir, quand elles seraient forcées de quitter le monastère.



jardin

Photo Paul Planté - "Saint Marcel de Careiret, un village méconnu !"



L’annexe de l’abbaye de Valsauve à Saint Marcel de Careiret. Photo de Paul Planté. On voit à droite, le dortoir des nones et à gauche au milieu de l’escalier le logement de la mère supérieur. En haut de l’escalier, on aperçoit la porte ouvragée de la chapelle.

Le style est un mélange de roman et de gothique. A côté de ces constructions se trouvait un cimetière, où l’on découvre encore des ossements humains. Cette maison s'élève à l’extrémité nord-ouest du village. Plusieurs familles l’habitent. Le quartier qu'elle forme porte, dans l’atlas cadastral de 1834, vingt numéros, de 637 à 658. La superficie totale des bâtiments, cours et jardins, est de 14 ares 8 centiares.

Plus tard, cette retraite ne leur ayant, sans doute, pas donné une assurance suffisante de sécurité, au milieu des troubles qui persistaient, elles se transportèrent à Bagnols. Les solides remparts de cette ville leur offrirent un refuge plus sur.

Les ressources de sa population nombreuse leur procurèrent aussi des avantages impossibles à trouver dans un modeste village. Elles étaient déjà installées à Bagnols en l’an 1375, du moins une partie d'entre elles, ayant à leur tête Béatrix de La Pierre. Les autres semblent être restées à Valsauve ou à Saint-Marcel, sous la direction de leur prieure Marguerite de La Baume. Le pape Grégoire XI approuva cette translation à Bagnols et leur donna, comme nous l'avons dit, le bénéfice de Saint-Cyr-les-Maransan. Les lettres d'union de ce bénéfice au couvent de Valsauve portent la date de la cinquième année du règne de ce pontife, ce qui les place en l’année 1375.

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PARTIE I - Origine de Salsauve
Suite : PARTIE II - Histoire des Mères Supérieures à Valsauve
Suite : PARTIE III - Histoire des Abbesses à Bagnols
Suite : PARTIE IV - Le XVIII° siècle débute par un nouveau massacre à Valsauve
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